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de la cooccurrence autour du mot choisi dans le discours du qui
C. de Gaulle - 16 avril 1963
Allocution radiotélévisée
Pour être prospères , maîtres de nous - mêmes et puissants , nous , Français , avons fait beaucoup . Il nous reste beaucoup à faire . Car le progrès exige l' effort . L' indépendance n' est pas pour rien . La sécurité coûte cher . C' est bien pourquoi l' Etat , qui a pour rôle et pour raison d' être de servir l' intérêt général , n' a pas le droit au laisser - aller .
Cela est clair , tout d' abord , dans le domaine économique et social . Actuellement , il est vrai , notre pays est en plein essor . Après avoir rétabli ses finances , ses échanges et sa monnaie , il accomplit , quant à son développement , des progrès rapides et saisissants . Tous les chiffres , tous les signes , démontrent , en particulier , que la condition des Français ne cesse de s' améliorer . Le terme de " rattrapage " , souvent employé aujourd'hui , en est la meilleure preuve . Car , si certains , qui se croient en retard , veulent rattraper le peloton , c' est , bien évidemment , parce qu' il a pas mal avancé . Mais il n' y a pas d' ascension qui dure si la marche n' est pas régulière et la montée méthodique . Il nous faut un Plan , et qui soit effectivement observé .
Ce plan nous l' avons ! Il a été , comme on sait , bâti avec le concours des représentants de toutes les activités nationales . Il a fait l' objet d' une loi . Il aboutit , en 4 années , dont l' une est déjà passée et la seconde commencée , à un accroissement d' expansion de 24 pour 100 et , une fois prélevés sur ce total les investissements nécessaires aux progrès futurs , à 20 pour 100 d' amélioration du niveau de vie des Français , s' ajoutant aux 10 pour 100 atteints pendant les 3 années antérieures . Cela ne s' est jamais vu . De ce fait , s' ouvrent devant la nation , et spécialement devant sa jeunesse , les plus vastes perspectives d' activité et de fraternité . Mais le devoir des pouvoirs publics est de faire en sorte que soient respectées les règles et les limites , faute que tout soit compromis .
Naturellement , chaque personne et chaque profession désirent , pour ce qui les concerne , obtenir davantage encore . Naturellement , chacun de ceux qui sont directement intéressés à telle ou telle de nos grandes entreprises : logement , enseignement , agriculture , aménagement du territoire , hospitalisation , communications , et cetera , voudrait que , dans la branche particulière qui le touche , on aille plus vite qu' on ne va . Et de crier : " des sous ! des sous ! " ou bien : " des crédits ! des crédits ! " . Mais les sous et les crédits ne sauraient être alloués que si nous les possédons , si l' équilibre entre nos rémunérations et nos prix , nos achats et nos ventes , nos recettes et nos dépenses ne s' en trouve pas bouleversé , si notre pays ne tombe pas dans l' inflation , c' est - à - dire dans un désordre qui arrêterait l' expansion , ruinerait la masse des citoyens et mettrait notre existence à la merci de l' étranger .
Ce n' est pas à dire , qu' à mesure que nous montons , il n' y ait pas à effectuer à l' intérieur du revenu national des aménagements commandés par la justice ou par le rendement . Le pouvoir a l' obligation d' assurer , non pas la parité qui ne saurait exister dans la diversité et la complexité de la société moderne , mais la part de chacun dans le progrès général . Comprenons bien , cependant , que notre époque nous contraint aux disciplines inhérentes à cette vaste transformation . Comme celle-ci se heurte , parfois , à des habitudes d' antan , il n' est pas surprenant , bien qu' il soit évidemment fâcheux , que se produisent , chez nous comme ailleurs , des tâtonnements et des erreurs . Cela vient d' être le cas avec la grève des charbonnages . Mais justement ce qui s' est passé et qui a , tout à la fois , ralenti quelque peu l' ensemble de notre production , coûté vraiment trop cher aux mineurs et risqué de peser sur l' avenir de leur profession , a contribué à faire voir combien il est nécessaire que la collectivité s' adapte , mieux qu' elle ne l' est , aux conditions nouvelles de sa vie et de son progrès .
Cela implique d' abord que le gouvernement lui-même soit organisé , dans ses conseils techniques et dans son administration , pour étudier , apprécier et décider en plus complète connaissance de cause , quand il s' agit , soit de mesurer ce qu' il est équitable de faire en faveur de telle profession , soit de l' appeler à fournir ce qu' elle doit à la vie de la nation . Cela implique aussi que les syndicats , quelque explicables que puissent être leurs revendications professionnelles , soient affranchis des sujétions et des griefs partisans et pratiquent l' esprit de la coopération nationale dans leurs rapports avec les hommes responsables de l' intérêt public . Cela implique encore que notre Conseil économique et social , où collaborent les représentants des diverses activités du pays , voie son rôle assez étendu pour mieux éclairer , par ses débats et par ses avis , les décisions , décrets et lois qui incombent aux pouvoirs politiques , exécutifs et législatif . Mais , par dessus tout , cela implique que l' Etat tienne les rênes , qu' il soit la force qui soulève la vague mais aussi la digue qui contient la marée et que , loin de laisser les ruisseaux de la démagogie se faire jour de tous les côtés , grossir , devenir des torrents irrésistibles , jusqu' à ce que la maison soit engloutie sous l' inondation , il continue de mener le pays , conformément aux règles et aux objectifs du plan , vers une puissance et une prospérité accrues au profit de tous ses enfants . La République , pour être le progrès ne peut être la facilité .
Elle ne saurait , non plus , l' être au dehors . Après la seconde guerre mondiale , notre pays a vu , en effet , sa puissance et son influence terriblement diminuées par rapport à celles des deux colosses du monde . Encore , jusqu' à l' année dernière , était -il divisé et paralysé par les séquelles d' une colonisation qui eut ses mérites et ses gloires mais qui , en notre temps , n' était plus que vaine et périmée . Or voici que , ressaisi par le génie du renouveau , en plein développement d' invention , de production , de démographie , pourvu d' institutions solides , dégagé des servitudes coloniales , il se retrouve , pour la première fois depuis un demi-siècle , avec l' esprit et les mains libres . Aussi peut -il et doit -il jouer dans l' univers un rôle qui soit le sien .
Cette politique n' est pas aisée . L' univers abonde en sirènes qui nous chantent les douceurs du renoncement , à moins que , dépitées de nous voir insensibles à leur séduction , elles n' élèvent à notre égard un chœur bruyant d' invectives . Mais , sans outrecuidance , dans l' intérêt de tous comme dans le nôtre , notre navire suit sa ligne . Il n' y a aucune chance pour que , cédant à la facilité , nous laissions s' effacer la France .
C' est pourquoi , si l' union de l' Europe occidentale : Allemagne , Italie , Hollande , Belgique , Luxembourg , France , est un but capital de notre action au dehors , nous n' avons pas voulu nous y dissoudre . Tout système , qui consisterait à transmettre notre souveraineté à des aréopages internationaux , serait incompatible avec les droits et les devoirs de la République française . Mais aussi , un pareil système se trouverait , à coup sûr , impuissant à entraîner et à diriger les peuples et , pour commencer , le nôtre , dans des domaines où leur âme et leur chair sont en cause . Cette abdication des Etats européens , en particulier de la France , aboutirait inévitablement à une sujétion extérieure . C' est d' ailleurs , pour éviter une telle inconsistance et , de ce fait , une telle dépendance , que nous tenons à voir l' union de l' Europe constituée par des nations qui puissent et veuillent réellement lui appartenir . Gardant l' espoir qu' un jour peut-être le grand peuple anglais , s' étant détaché de ce qui le retient hors de notre communauté , viendra s' y joindre suivant les conditions qui sont celles de l' institution , nous estimons qu' elle doit se développer telle qu' elle est et sans attendre . Bref , il nous paraît essentiel que l' Europe soit l' Europe et que la France soit la France .
D' autre part , à l' intérieur de l' alliance atlantique , indispensable tant que se dressent les ambitions et les menaces des Soviets , notre pays , tout en conjuguant sa défense avec celle de ses alliés , entend rester le maître et , le cas échéant , apporter à l' effort commun tout autre chose que le concours sans âme et sans force d' un peuple qui ne serait plus responsable de lui-même . Cela nous conduit à nous doter des moyens modernes de notre sécurité , autrement dit de ceux qui pourraient détourner quiconque d' attaquer notre pays , à moins de subir lui-même d' épouvantables destructions . Je veux parler , naturellement , des armes atomiques . Il est vrai que nos alliés Américains disposent , à cet égard d' une puissance colossale , susceptible de jeter au chaos tout ou partie de l' empire soviétique , qu' ils sont résolus , nous le savons , à combattre , éventuellement , pour empêcher que l' Europe ne tombe , morte ou vive , dans l' autre camp , qu' ils sont nos bons alliés comme nous - mêmes sommes les leurs . Mais toute la question n' est pas là !
En effet , l' adversaire éventuel est pourvu , lui aussi , de moyens énormes et de la même sorte . Cela étant , personne , nulle part , ne peut savoir d' avance si , dans le cas d' un conflit , les bombes atomiques seraient ou non , initialement employées par les deux champions , si , dans l' affirmative , ils les emploieraient seulement en Europe centrale et occidentale sans se frapper l' un l' autre directement et aussitôt , ou si , au contraire , ils seraient amenés tout de suite à se lancer réciproquement la mort dans leurs œuvres vives . De toute façon , et compte tenu de cette immense et inévitable incertitude , il faut que la France ait elle-même de quoi atteindre directement tout Etat qui serait son agresseur , de quoi , par conséquent , le dissuader de l' être et de quoi , suivant les circonstances , concourir à la défense de ses alliés , y compris , qui sait ? l' Amérique .
En somme , notre pays , perpétuellement menacé , se trouve , une fois de plus , confronté avec la nécessité de disposer des armes les plus puissantes de l' époque , à moins , bien entendu , que les autres cessent d' en posséder . Cependant , pour nous détourner , s' élèvent , comme toujours , les voix simultanées de l' immobilisme et de la démagogie . " C' est inutile ! " disent les unes . " C' est trop cher ! " disent les autres . Ces voix , la France les écouta , parfois et pour son malheur , notamment à la veille de chacune des deux guerres mondiales . " Pas d' artillerie lourde ! " clamaient - elles de concert jusqu' en 1914 . " Pas de corps cuirassé ! pas d' aviation d' attaque ! " criaient ensemble , avant 1939 , les mêmes catégories d' attardés et d' écervelés . Mais , cette fois , nous ne laisserons pas la routine et l' illusion appeler chez nous l' invasion . Et puis , au milieu du monde tendu et dangereux où nous sommes , notre principal devoir c' est d' être forts et d' être nous - mêmes .
Françaises , Français , après beaucoup d' épreuves , nous avons eu à nous décider pour le progrès ou pour le déclin . Le choix est fait . Nous avançons . Mais il y faut de l' ordre et de l' effort . A d' autres la facilité !
Vive la République !
Vive la France !