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J. Chirac - 3 mai 1998
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C' est une des premières fois , depuis bien longtemps , que je ne suis pas présent à la Coupe de France , et je l' ai beaucoup regretté . J' avais tout prévu , sauf que cela durerait si longtemps . Et nous sommes rentrés à trois heures et demi du matin , ce qui était tard , même pour la troisième mi-temps .
C' est un accord à Quinze pour que onze pays entrent immédiatement . Les 4 autres , soit ne remplissaient pas les conditions -ce qui était le cas de la Grèce- , soit ont décidé d' attendre - à mon avis , pas très longtemps - pour rejoindre les onze premiers , c' est - à - dire l' Angleterre , la Suède et le Danemark .
C' est une très grande réforme que de décider à renoncer à sa propre monnaie et de créer une monnaie commune . Et c' est une très grande réforme , c' est un très changement qui , pour une fois en Europe , n' est pas fait par les armes . D' habitude , chaque fois que l' Europe a changé , c' était à la suite de guerres et de moments extrêmement difficiles . Cette fois - ci , c' est un libre consentement de chacun qui nous a permis de franchir ce pas décisif , qui va donner à l' Europe le moyen d' exister et d' être la première puissance économique , financière et , par là - même , renforcer considérablement son poids politique dans le monde .
Oui , cela , je le comprends très bien . La disparition d' une monnaie qui est aussi ancienne que le franc pour un pays comme le nôtre , c' est un vrai sacrifice , de la même nature d' ailleurs que celui qu' assument les Allemands ou les autres . J' entends ici ou là que c' est une catastrophe , mais on ne peut pas indéfiniment mener les batailles du passé , c' est le meilleur moyen de perdre les guerres . Le monde change , il évolue , il faut s' adapter . Et nous ne pouvions pas rester avec un grand marché unique et des petites monnaies qui risquaient de temps en temps de se battre entre elles , ce qui nous a coûté très cher . Donc , c' est l' évolution . Il faut être conscients de la nécessité de se moderniser , de s' adapter .
Je crois que c' est une approche un peu confuse des choses . Jean Monnet qui est un grand Européen l' avait exprimé avec plus de finesse que ceux qui disent ce que vous rappelez , parce qu' il disait que le seul regret qu' il avait , c' est qu' on n' ait pas commencé par l' Europe de la culture . Ce qui était très joli , mais ce qui n' était pas naturellement très réaliste .
Nous avons un grand marché . Nous avons commencé par l' agriculture , puis nous avons réalisé un grand marché unique . Nous avons assuré la liberté de circulation des hommes , des capitaux , des marchandises . A partir de là , il allait de soi qu' il fallait qu' on ait un instrument monétaire unique , ce qui n' empêche pas d' ailleurs l' Europe d' évoluer politiquement aussi . Avec le Traité d' Amsterdam , par exemple , on a pris un certain nombre de décisions qui , dans le domaine de la politique de sécurité , de la politique étrangère , nous fait également progresser . Puis , nous mettons petit à petit en place des institutions qui , pour le moment , ne sont pas encore adaptées à une Europe qui s' élargit , mais qui font l' objet de nouvelles réformes , de nouvelles adaptations . Donc , les choses vont ensemble , d' un même pas .
Ma réticence n' était pas si forte puisque vous vous souviendrez que j' ai fait campagne et que j' ai voté pour le Traité de Maastricht au moment du référendum . Le Traité de Maastricht qui , précisément , avait pour objectif de prévoir la monnaie unique . Donc , réticence , oui , c' était au fond celle du cœur . Et puis la raison l' a emporté comme souvent .
J' ai le plus grand respect pour les réactions du cœur et j' en ai souvent . Mais il est un moment où lorsqu' on assume une responsabilité , il faut savoir obéir à la raison et avoir une certaine vision de l' avenir et non pas seulement des références au passé .
Ou tout autre sujet , ce n' est pas seulement sur l' Europe . Quand est au pouvoir , on assume des responsabilités qui exigent de faire un effort de réflexion . Quand on est dans l' opposition , il est beaucoup plus facile , c' est vrai , de critiquer . Mais les deux sont très positifs car il est nécessaire qu' il y ait une critique pour stimuler la réflexion de ceux qui sont au pouvoir , et c' est l' avantage de la démocratie .
Je ne crois pas qu' on puisse dire cela . Si j' en crois un très récent sondage qui a été fait en France , 67 % des Français sont favorables à la monnaie unique . Mais en revanche , globalement , votre réflexion est exacte . Je dirais qu' il est normal , hélas ! , que plus on est fragile , plus on est soumis à un sentiment de précarité - et c' est , hélas ! , le cas d' un beaucoup trop grand nombre de personnes dans notre société - et plus on est naturellement , spontanément frileux , plus on a peur du changement , et c' est tout à fait normal .
Il doit y avoir à cela deux réactions :
-Premièrement , expliquer et tenter de convaincre que le progrès passe aujourd'hui - le monde étant ce qu' il est-par un renforcement des solidarités de la zone géographique à laquelle nous appartenons .
-Deuxièmement , réduire cette fracture sociale , de faire en sorte que le processus qui nous y a conduits et qui a commencé en réalité par le chômage et ses conséquences , soit entravé .
Ma conviction est que nous sommes dans une phase où cette évolution conduit au chômage , et donc il faut réagir . Parmi les réactions contre cette baisse générale d' activité , il y a le fait de faciliter les échanges , de faciliter la concurrence , de faciliter l' initiative , et cela passe par une monnaie unique . Et donc la monnaie unique est aussi un moyen de nous inscrire dans un système qui sera plus moderne , plus porteur , plus dynamique .
D' abord , il ne faut pas confondre la rigueur économique et la sagesse dans la gestion . Si en sortant d' ici , vous voulez vous livrer à des dépenses tout à fait hors de proportion avec vos possibilités propres , ce n' est pas un problème de rigueur , c' est un problème de sagesse . Vous n' aurez pas été sage .
L' un des grands avantages de la monnaie unique , indépendamment du fait qu' elle facilitera beaucoup les échanges , et donc la production , et donc l' emploi , c' est d' imposer aux dirigeants de gérer sérieusement les choses , de faire les réformes permettant d' éviter ce que nous voyons trop souvent , les gaspillages . C' est un système de garde-fou .
Vous savez , en France , on a eu trop souvent l' habitude de voir , à des moments déterminés , la démagogie s' emparer des dirigeants et on se mettait à dépenser sans compter , généralement mal , en gaspillant beaucoup et en s' endettant , c' est - à - dire en reportant sur nos enfants la charge , ensuite , de rembourser . Aujourd'hui , par exemple , dans notre pays , nous sommes obligés de payer tous les matins 1 milliard de francs par jour ouvrable , en France , simplement pour rembourser les intérêts de notre dette . Vous vous rendez compte de cette perte ! Tout cela parce que , dans le passé , des dirigeants n' ont pas géré sérieusement nos affaires . Cela explique notamment la situation économique difficile que nous connaissons , un gaspillage considérable .
Cela ne sera plus possible parce que , avec la monnaie unique , il y a les critères de Maastricht . Ce ne sont pas des critères de rigueur , ce sont des critères de sagesse . Vous savez , dans les routes de montagne , on met des barrières pour éviter que les voitures , faisant une embardée , ne tombent dans le fossé . C' est cela les critères de Maastricht , c' est d' éviter les conducteurs un peu trop irresponsables .
Monsieur Field , on peut gérer en toute responsabilité et avec une très grande marge d' appréciation de façon sérieuse . Il n' y a pas de corrélation entre une gestion sérieuse et la liberté de faire n' importe quoi .
Naturellement ! mais la situation en mai 68 était tout à fait différente . En mai 68 , nous pouvions faire .
Ce que nous voulions , nous étions chez nous , avec des barrières hermétiques qui entouraient notre pays .
Non , nous sommes dans un ensemble cohérent . Nous sommes maintenant dans une maison qui comporte plusieurs pièces et nous devons l' entretenir .
Qu' est -ce qui s' est passé ? Vous dites : " En mai 68 , on a pris un certain nombre de mesures " , j' en ai un souvenir très clair , qu' avons -nous fait ?
Je ne vous le fais pas dire !
C' était un moyen de sortir d' une crise psychologique , politique , sociale . Ce n' était pas un moyen de gérer nos affaires . La preuve , c' est que , un an après , on a affaibli toute la France , on a appauvri tous les Français en faisant une dévaluation . On paie toujours . Alors , cela , effectivement , ne sera plus possible , et tant mieux !
Mais si un pays européen , demain , connaît une crise , c' est l' Europe entière qui s' associera pour la régler , par définition .
Mais c' est l' essence même de nos institutions . Toutes les discussions qui ont lieu autour de la table , entre les chefs d' Etat et de Gouvernement , sur tous les sujets que l' on peut imaginer , sont l' expression même d' une solidarité puisqu' on ne peut rien décider sans que , en réalité , tout le monde soit d' accord .
La grave erreur que font certains , c' est d' imaginer que nous perdons une capacité de décision en construisant l' Europe , ce n' est pas vrai ! Et la preuve , c' est qu' on peut toujours refuser une décision si elle est attentatoire , si elle met en cause vos intérêts importants .
Ce n' est pas un abandon , c' est une autre manière de travailler ensemble . Cela est tout à fait capital . C' est une manière moderne de travailler ensemble .
J' ai le souvenir quand j' étais Premier ministre en 1986 - 1987 , mon gouvernement a supprimé le contrôle des changes et le contrôle des prix . Aujourd'hui , quand vous évoquez ces méthodes , vous avez l' impression de parler du néolithique . Et pourtant c' était il y a très peu de temps .
Aujourd'hui , vous avez des systèmes qui font que , en quelques heures , les capitaux peuvent se déplacer . Donc , vous êtes bien obligé de gérer sérieusement . Et pour le cas où il y aurait des risques , alors vous avez des règles . Mais s' il y a crise dans un pays , il va de soi que la solidarité jouera , par définition . Et elle joue en permanence . Chaque fois qu' il y a un problème quelque part , c' est la solidarité qui joue .
Nous avons aujourd'hui - prenons un cas tout à fait typique d' une crise financière forte et localisée , le Crédit Lyonnais - une discussion extrêmement difficile dans les institutions européennes , entre elles et le Gouvernement français , qui ne sont pas naturellement pas d' accord pour la solution . Mais une solution interviendra avec l' accord des uns et des autres . Et c' est ainsi que , par la solidarité européenne , on sortira de la crise .
Donc , ce système européen est un système de gestion de crise qui est évidemment beaucoup plus moderne , adapté à la situation d' aujourd'hui , à un monde qui se mondialise - comme on dit- , c' est inévitable .
. Monsieur Field , si vous me permettez de revenir un instant très court sur le tableau que nous avons fait ensemble de cette Europe . Ne croyez pas que je veuille , moi , une Europe qui serait une sorte de société anonyme en pilotage automatique , pas du tout ! Ce que je veux , c' est une Europe . Et ce que nous faisons , c' est une Europe des volontés organisées , volonté des Etats et volonté des citoyens . Et vous savez , ce n' est rien d' autre que l' Europe qu' avait imaginée au départ le Général de Gaulle .
En 1958-cela nous paraît évidemment très , très ancien , c' est de l' histoire- , cela a été la vision du Général de Gaulle , alors qu' on avait abandonné l' idée du Traité de Rome , il a dit : " Il faut construire l' Europe et il a appliqué le Traité de Rome " . Deuxièmement , il a dit : " Il faut faire l' Europe des Etats " , et non pas je ne sais quelle Europe fédérale . Et , enfin , il a dit : " Il faut faire l' Europe de l' Atlantique à l' Oural " , c' est - à - dire il faut une Europe européenne .
Et aujourd'hui qu' est -ce qu' on constate ? On construit l' Europe pas à pas et on continue . Il y a encore à faire . On a une Europe qui s' élargit -elle n' ira peut-être pas jusqu' à l' Oural , mais enfin elle sera européenne - et on a une Europe des Etats . Il n' y a plus de discussions oiseuses sur la nature de l' Europe . L' Europe , aujourd'hui , est constituée par des Etats .
J' avais dans cette affaire une position qui n' avait rien à voir avec la personnalité de Monsieur Duisenberg qui est un homme tout à fait éminent , compétent , qui a fait ses preuves et qui sera un excellent Président . Mais je faisais deux remarques :
La première , c' est que le Président de la Banque , comme le gouverneur de la Banque de France , doit être totalement indépendant . Cela est vrai ! Il a en charge la gestion de la monnaie , c' est - à - dire la fixation des taux d' intérêt . Mais il doit être indépendant après avoir été nommé . Et ma première remarque était de dire : " Il n' est pas normal que les banquiers centraux aient décidé entre eux , sans concertation réelle avec le politique , de nommer tel ou tel des leurs à la tête de la Banque " , d' où ma première réserve de forme .
La deuxième , c' est que je considérais que la France , deuxième puissance économique de l' Europe , deuxième puissance monétaire , au moment où l' Europe s' engageait dans la mise en place de cette monnaie unique , devait être représentée et non pas , en quelque sorte , absente .
Alors , bien entendu , tout cela a donné lieu à des discussions qui ont été difficiles , comme toujours quand il s' agit des questions de personnes . Ce qui montre bien d' ailleurs que c' est bien d' une Europe des Nations . Pourquoi est -ce que je réagis comme ça ? Parce que je considère que la Nation française doit avoir sa part de responsabilité , et d' autres avaient le même sentiment que moi .
Je suis heureux qu' on ait pu arriver à une solution où la France aura la vice-présidence pendant 4 ans et la présidence pendant huit ans après que Monsieur Duisenberg ait fait connaître que , de sa propre volonté , sans que personne ne le lui ai demandé - naturellement , il est tout à fait indépendant- , il ait décidé d' interrompre son mandat à la fin de la période transitoire .
. Ce débat . Cela , je le reconnais !
Alors , là , je vous assure que l' Europe parle très franchement et que parfois même le ton monte . C' est très régulier . C' est même plutôt le ton moyen est assez élevé .
Dans le cas particulier , nous avons un traité . Ce traité prévoit que le Président de la Banque est nommé pour huit ans . Il n' est pas question naturellement de violer le traité , nous devons le respecter . Par conséquent , nous avons nommé Monsieur Duisenberg pour huit ans . Monsieur Duisenberg , pour des raisons personnelles - et je peux vous assurer sans aucune pression particulière - a dit clairement que lui ne voulait pas aller au-delà de la fin de la période transitoire , c' est - à - dire au-delà du moment où les monnaies nationales seraient retirées et les pièces et les billets de l' euro seraient distribués . Cette période se situe entre le 1er janvier et le 1er juillet de 2002 , probablement en réalité dans les deux premiers mois de 2002 parce qu' on ne pourra pas laisser une période trop longue avec deux monnaies matérielles . Monsieur Wim Duisenberg a pris cette décision et cela a permis , effectivement , de dénouer les difficultés .
Et , moi , je m' en réjouis parce que la France va avoir , pendant quelques mois , à la fois le Président et le vice-Président . Que le Directoire de cette Banque est composé d' un Président , d' un vice-Président et de 4 membres . Nous avons le vice-Président tout de suite . Nous aurons dans trois ans et demi , le Président , et même pendant 6 mois les deux . Donc , nous serons réellement , dès le départ , associés à la mise en œuvre de cette grande réforme , et pour nous c' est capital .
J' entends de temps en temps des gens dire : " Ah ! mais nous allons être sous l' influence du mark " , il ne faut pas polémiquer de cette façon parce qu' on désinforme les gens . D' ailleurs , les Allemands eux - mêmes reprochent à leurs dirigeants d' avoir abandonné trop facilement le mark . La vérité , c' est qu' il y a maintenant une institution dans laquelle la France aura une place éminente , notamment pendant la phase de démarrage , ce qui est la phase capitale , et donc un pouvoir monétaire non négligeable .
Monsieur Field , il y a d' abord une chose essentielle : nous avons pratiquement assuré la paix et la démocratie sur un continent , dont le moins que l' on puisse en dire , est qu' il était assez allergique à cette sérénité . C' est capital !
Naturellement , aujourd'hui , les jeunes n' ont pas idée que l' on puisse se faire la guerre ! Mais toute l' histoire de l' Europe est une histoire de remise en cause des Droits de l' homme , indéfiniment , de mise en cause de la démocratie pour tous les pays ou dans certains pays , et une histoire de guerres .
Aujourd'hui , le grand mérite de la construction est d' avoir assuré la paix et renforcé la démocratie . On n' imagine pas tout d' un coup que , dans les pays européens , l' union , la démocratie soient mises en cause ou que la guerre puisse se faire ! Et lorsque le processus sera achevé , c' est - à - dire que tous les pays européens seront intégrés dans l' Union , ce qui sera le cas dans 10 , 15 ans , alors cela aura été une véritable réforme pour la paix .
Il y a naturellement , pour cela , la nécessité de faire en permanence d' autres réformes . Monsieur Delors , qui a tant donné de son énergie , de son intelligence à la construction européenne , a raison d' être impatient , notamment sur le plan de la réforme institutionnelle . Nous avons besoin d' institutions adaptées , ce qui marchait pour Six , qui marche plus ou moins bien pour Quinze , ne marchera plus pour Vingt . Le système institutionnel , la manière de prendre les décisions ne marche plus . Et , donc , nous avons devant nous une grande réforme sur ce point . Elle est difficile à faire , parce que l' on a , d' un côté , les pays les moins peuplés qui sont très attentifs à ce que leur souveraineté ne soit pas mise en cause et leurs droits non plus , et puis , de l' autre côté , les puissances les plus importantes de l' Europe , qui sont également très attentives à ne pas être bloquées par l' initiative de " petits pays " , si j' ose dire , qui se coaliseraient , en quelque sorte , contre les grands .
Donc , c' est un système difficile . Et je pense que -vous parliez de Monsieur Delors - cela pourrait être une contribution supplémentaire qu' il pourrait faire à l' Europe : c' est d' essayer de conseiller les autorités européennes sur le meilleur compromis à élaborer pour permettre aux Institutions de bien fonctionner dans l' avenir .
Je crois qu' il faut que chacun fasse son métier . Je le disais tout à l' heure : la Banque doit être indépendante , comme nos banques centrales sont aujourd'hui indépendantes . Cela est capital . Rien n' est pire que de laisser le politique manipuler les taux d' intérêt dans le monde d' aujourd'hui où les capitaux vont , d' un point à l' autre , très librement .
Le Conseil de l' euro correspond donc à quelque chose de nécessaire . Ce n' est pas une instance décisionnelle . La décision , c' est le Conseil des ministres des Finances et , au-dessus , le Conseil des chefs d' Etat et de Gouvernement . Mais ce Conseil de l' euro marque bien qu' il y a un pouvoir politique en face du pouvoir des banquiers centraux . Et je trouve que c' est une bonne chose .
Je me permets de vous signaler que , comme pour les problèmes sociaux , le modèle social européen et la prise en compte des problèmes de l' emploi , c' est la France , là aussi , qui a été à l' initiative pour la création de ce Conseil de l' euro .
Ce sera même difficile , surtout pour des gens qui ont été très longtemps habitués au franc , c' est - à - dire les personnes âgées . Il va être très important de gérer cette affaire avec beaucoup d' attention . Il faudra d' abord élaborer et mettre à la disposition de tous les Européens des calculettes qui soient à la fois faciles de maniement , extrêmement simples . Nos ingénieurs trouveront certainement ce qu' il faut dans ce domaine .
Il faudra également que - elles ont commencé pour certaines d' entre elles , les banques ou certaines banques- , bien avant l' échéance , il y ait en quelque sorte un double système pour que les gens puissent apprécier les choses . Il y a les associations qui devront faire un effort important , notamment les associations de consommateurs , d' autres aussi . Il y a , enfin , l' administration qui ne devra pas laisser , comme on le fait trop souvent , les gens se débrouiller , si j' ose dire , mais qui devra prendre en charge l' ensemble des procédures pour tout simplifier et pour se substituer , chaque fois que c' est possible , au citoyen , à l' individu , de façon à lui éviter d' avoir des efforts ou une gymnastique intellectuelle difficile . Mais c' est vrai que l' on aura des problèmes et des difficultés . Vous savez , on n' a jamais rien sans problèmes . C' est très , très rare qu' une grande réforme se fasse sans difficultés .
J' ai un petit-fils qui a deux ans , eh bien je suis très heureux de me dire qu' il ne connaîtra pratiquement , en réalité , que l' euro . Cela ne lui posera aucun problème .
A moi , ce sera peut-être différent !
Non ! Je n' en conviendrai pas , non ! Enfin , je nuancerai plus exactement .
Il y a eu deux problèmes : c' est vrai que l' Europe est accusée souvent d' être trop technocratique . Si elle est accusée de cela , c' est parce qu' elle l' est . Et , donc , il y a - c' est pourquoi je parlais tout à l' heure de la réforme institutionnelle - à lutter contre l' envahissement naturel et spontané de la technocratie . Cela est vrai ! Cela a conduit à privilégier tout ce qui était politique , économique , financier , monétaire , un peu au détriment du social .
Tout de suite après mon élection , j' ai lancé l' idée d' un modèle social européen . A l' époque , j' étais tout seul . Je voulais simplement affirmer que nous avions un modèle social qui est celui de la plupart des pays européens et qui est fondé sur trois pieds , si j' ose dire :
-des négociations collectives ,
-une protection sociale ,
-et un rôle de l' Etat pour assurer la cohésion sociale et nationale .
Je pense donc que l' Europe doit l' adopter . Au début , je le répète , j' ai été , c' est vrai , pas critiqué , mais ignoré .
Aujourd'hui , tout le monde l' a adopté , et c' est un très grand progrès . Le pilier social a été intégré par le Traité d' Amsterdam dans le Traité .
Il reste encore beaucoup à faire . Mais , déjà , on a progressé beaucoup sur le modèle social , et il reste naturellement à faire . Il reste à faire dans tous les domaines , d' ailleurs .
De la même façon , c' est une initiative qui revient , d' ailleurs , à la fois au Gouvernement français et à moi : à l' occasion du Sommet de Luxembourg , nous avons , pour la première fois , fait admettre que le chômage devait être un élément essentiel de l' appréciation des décisions économiques , monétaires , financières que l' on pouvait prendre , ou politiques . Et cela a été fait . Les différents gouvernements déposent en ce moment même , cela a été fait il y a quelques jours , leur plan national pour l' emploi de façon que l' on puisse en assurer une certaine cohérence . Car , il est bien évident qu' il faut faire attention , là encore , de ne pas avoir trop de divergences , de ne pas se laisser aller à la démagogie . Il faut que l' ensemble soit sérieux .
J' avais cru l' observer .
Ce n' est pas quelque chose de nouveau . Tout à l' heure , sur les écrans , on a vu apparaître un sujet qui partait du Général de Gaulle pour arriver à Monsieur Mitterrand et à moi - même , d' où il ressortait qu' il y avait une continuité dans la volonté de construction de l' Europe . C' est vrai ! Il y a une continuité , quelqu' aient été les gouvernements .
Dans deux jours , pour marquer l' événement , j' ai invité à déjeuner à l' Elysée tous les anciens Premiers ministres , avec le Premier ministre actuel , naturellement . J' aurais pu inviter beaucoup d' autres personnalités qui ont eu un rôle important dans la construction européenne , mais tel n' était pas mon objectif . Mon objectif était de montrer que la construction européenne a été un effort commun , long , mais allant dans la même direction , de gouvernements qui , par ailleurs , s' appuyaient sur des majorités qui étaient soit de droite , soit de gauche .
Donc , la politique européenne a été un élément commun du patrimoine politique et de la volonté politique , aussi bien des responsables de droite , que des responsable de gauche dans notre pays . Et il est normal qu' aujourd'hui il n' y ait pas de divergences de vue dans ce domaine .
Alors , en revanche , pas de clivage entre la droite et la gauche . En revanche , il y a un clivage dans la droite et un clivage dans la gauche . Et je dirais que c' est tout à fait naturel et normal . C' est un peu , si j' ose dire , la querelle des " anciens " et des " modernes " , qui se retrouve aussi bien dans la majorité que dans l' opposition .
Quand je dis : la querelle des " anciens " et des " modernes " , ce n' est pas du tout trivial . Je veux dire que la querelle des " anciens " et des " modernes " au dix-huitième siècle .
ce n' était pas péjoratif pour qui que ce soit . Mais c' est vrai qu' il y a toujours , probablement partout , mais en tous les cas en France , une querelle des " anciens " et des " modernes " . Voilà , je crois que c' est cela le fond du problème .
J' ai crû comprendre que le RPR avait voulu dire oui à L' Europe et à l' euro , c' est ce qui a été clairement exprimé , notamment par son Président , Monsieur Philippe Séguin , qui a dit très clairement et , d' ailleurs brillamment , comme d' habitude : oui à l' Europe et à l' euro . Non à la politique du Gouvernement pour permettre à la France de s' épanouir convenablement dans le nouveau système européen .
Je ne parle pas , naturellement , des polémiques ou des procédures parlementaires , ce n' est pas mon rôle d' en juger naturellement . Mais sur le fond , on ne peut tout de même pas reprocher à un parti politique d' opposition de s' opposer , non pas à l' Europe , il l' a dit clairement , mais au Gouvernement .
Là , je veux bien en convenir ! Et je crois que nous sommes précisément dans une période où il faudrait éviter les désordres . Il faut , pour faire face aux responsabilités de chacun , aussi bien nationales qu' européennes , être fort , et c' est l' union qui fait la force . Là , je suis tout à fait de votre avis . Mais il n' en reste pas moins que l' autre formation de l' opposition a pris une position différente , a fait un choix différent , peut-être pour bien marquer que sa sensibilité européenne l' avait emporté !
Mais il ne faut pas en tirer de conclusion particulière : l' ensemble de l' opposition a dit clairement OUI à l' Europe et à l' euro . Ce qui n' a pas été le cas , je l' observe , dans la majorité .
Vous savez , j' observe les choses de l' extérieur .
Tout à fait à l' extérieur .
Je note que , dans la majorité , le clivage était beaucoup plus clair .
Il était attendu , oui . Mais , enfin , on ne peut pas condamner ce qui se passe dans un camp et absoudre automatiquement ce qui se passe dans l' autre .
Monsieur Field , vous avez raison de le dire qu' elle me tient à cœur . Je suis issu d' une famille politique qui est la famille gaulliste , et vous n' imaginez pas que je vais la renier . J' ai toujours été gaulliste et je reste gaulliste , et probablement jusqu' à la fin de mes jours .
Cela ne pose aucun problème . Je ne suis plus un chef de Parti , avec une responsabilité partisane . Un Président de la République doit être fidèle à ses idées et ne pas les renier . D' ailleurs , quand j' ai des critiques à formuler à l' égard du Gouvernement , je le fais .
Mais il doit également prendre en compte un élément essentiel : le Président de la République a été élu par les Français . Il est le Président de tous les Français et il ne peut pas ignorer , naturellement , ou négliger le Gouvernement que les Français se sont donné ! Ce n' est pas moi qui ai élu l' actuelle Majorité , ce sont les Français !
Ce sont les Français qui l' ont élue ! Et , par conséquent , il m' appartient de faire en sorte que les institutions fonctionnent convenablement , que le Gouvernement puisse gouverner , même s' il m' appartient , fidèle à ma famille politique et à mes convictions , surtout , politiques , de faire valoir mon point de vue ou d' exprimer mon point de vue quand je l' estime nécessaire . Je l' ai fait et je continuerai à le faire . Mais on peut faire cela , je dirais , dans une certaine sérénité .
Il faut mettre définitivement un terme à cette habitude qui a été trop longtemps celle des Français , contrairement d' ailleurs à d' autres pays ou à la plupart des pays qui nous entourent , de concevoir l' opposition politique comme un combat de chiffonniers . Non ! Je respecte tout le monde et j' entends que les institutions fonctionnent , en tous les cas .
Oh , je veux bien assumer toutes les responsabilités que l' on voudra ! Mais , très franchement , les crises sont des choses qui arrivent régulièrement . Le grand avantage , c' est qu' en général on en sort renforcé . Et je souhaite que ce soit le cas . Je n' y trouve pas véritablement ma main , parce que je ne m' occupe pas de l' action de l' opposition , mais je souhaite , je le répète , que l' opposition ait conscience - son objectif étant naturellement de retrouver la majorité , ce qui est légitime pour une opposition dans un système démocratique- , sous une forme à déterminer , bien entendu , et qu' il lui appartient de déterminer , que " seule l' union fait la force " .
Eh bien , écoutez , je considère que ce n' est pas d' actualité . Et je souhaite que l' euro puisse être notre monnaie , puisse être un succès , quel que soit le Président de la République française .
Merci , Monsieur Field .