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Qui utilise le plus le mot «patrie» ?
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Analyse multi-couches
de la cooccurrence autour du mot choisi dans le discours du qui
C. de Gaulle - 2 octobre 1961
Allocution radiotélévisée
Rénovation nationale ! Voilà une vaste et rude entreprise ! Car à la France telle qu' elle est l' époque et le monde où nous vivons n' offrent le choix qu' entre une grande réussite ou un abaissement sans recours . Grâce à l' unité profonde dont notre peuple donne l' exemple , nous sommes en marche vers la réussite . Mais si par malheur nous laissions de nouveau le tracassin , le tumulte , l' incohérence , que l' on connaît , s' emparer de nos affaires , c' est l' abaissement qui serait notre lot .
A l' intérieur , notre pays est en train d' accomplir une transformation , qui le destine , pour l' avantage de tous ses enfants , à une prospérité et à une puissance dignes de lui . Mais cela exige qu' aucun intérêt particulier ne puisse l' emporter sur l' intérêt général , que notre économie , notre administration , notre technique , notre enseignement , notre équipement , s' élèvent sans cesse à l' échelle moderne , que cependant rien ne puisse prévaloir contre les objectifs du plan , la solidité des finances , la stabilité du franc , qui sont les bases de l' édifice .
Dans ce développement , dans cette discipline , beaucoup de choses ont été réalisées déjà , et tout le monde le sait . Beaucoup sont en cours , et tout le monde le voit . Beaucoup sont à faire , et tout le monde le croit . Mais il n' y aurait aucune chance d' aboutir à aucun progrès réel , ni de maintenir ce qui est acquis , si nous retombions dans l' agitation et les crises .
Pour ce qui est de l' Algérie , à travers les vents et les marées , nous n' avons pas cessé depuis 3 ans de nous approcher du but que j' ai fixé au nom de la France : exercice par les Algériens du droit de disposer de leur destin , institution , s' ils le veulent - et je ne doute pas qu' ils le veuillent - d' un Etat algérien indépendant et souverain par la voie de l' autodétermination , coopération de la France offerte à l' Algérie nouvelle pour sa vie et pour son développement , ce qui implique en particulier que la communauté d' origine européenne d' Algérie y ait ses droits et ses garanties .
Dans le même temps où à partir de la secousse de mai 1958 s' accomplit l' évolution qui conduit l' immense majorité des Français et des Algériens à cette solution claire et ferme , l' armée française , les forces de l' ordre françaises , devaient et doivent s' assurer de la maîtrise du terrain . Cela a été fait . Enfin , sous peine d' effondrement , il fallait , il faut , qu' en dépit des excitations à la désobéissance et à la désertion prodiguées par des dévoyés , l' armée soit restée et reste maintenue dans le devoir . Elle l' a été . Elle l' est . Honneur à elle !
A présent , on peut construire . Nous sommes prêts à rechercher encore un accord avec les dirigeants de la rébellion , pour ramener décidément la paix en Algérie , régler les conditions de l' autodétermination , fixer les éléments d' une coopération franco-algérienne . Nous sommes en même temps - car l' un n' exclut pas l' autre - désireux de voir en Algérie les éléments représentatifs entreprendre de leur propre chef la préparation de cette grande opération que sera le référendum . Nous sommes de toute façon décidés à organiser dès à présent une force publique proprement algérienne , dont disposera le pouvoir provisoire , quand il assumera la responsabilité de conduire le pays à la décision .
Nous déclarons aux Algériens que la paix , le choix , l' avenir de l' Algérie sont à leur portée à eux . Nous adjurons les Français d' Algérie , quels que puissent être les regrets que leur inspire une époque révolue , de se tenir avec la France , d' apporter leur franc concours à la naissance de l' Algérie nouvelle , celle que souhaite la France , c' est - à - dire telle qu' ils y aient leur digne place .
Il reste bien sûr entendu que s' il n' en était pas ainsi leur protection serait en tout cas assurée , soit en les regroupant dans des zones de sécurité , soit , pour ceux qui le demanderaient , en leur procurant les moyens de prendre part dans la métropole à l' activité nationale .
Hier pour avoir voulu cela et l' avoir fait peu à peu adopter dans la grande masse des esprits , aujourd'hui et demain pour mener l' ouvrage à son terme , il fallait , il faut , il faudra une constance et une fermeté qui excluent bien évidemment les incertitudes , les faiblesses et les contradictions de naguère , condamnées par le peuple et par les événements .
La transformation du pays et le changement complet de nos rapports avec l' Algérie , nous devons y procéder dans une période de danger mondial . Tout ce que nous avons à faire en est terriblement compliqué . Comme nous sommes la France , essentielle à l' Europe et nécessaire au monde libre , il nous incombe de nous décider nous - mêmes et d' engager nos Alliés à se tenir fermes et droits devant les sommations du bloc totalitaire . Car rien ne serait plus dangereux pour notre cause , pour notre sécurité , pour notre alliance , pour la paix , que de reculer pas à pas devant ceux qui nous menacent .
Mais que cessent les mises en demeure , que s' établisse enfin une détente internationale , que les rapports entre l' Est et l' Ouest deviennent normaux , alors la France sera prête à ouvrir entre grands Etats une négociation constructive sur les problèmes de l' univers : l' Allemagne , le désarmement , l' aide aux pays sous-développés , la coopération en vue du progrès humain . Sans doute pourrait -elle , d' autre part , favoriser l' apparition d' une Europe équilibrée entre l' Atlantique et l' Oural , dès lors que l' impérialisme totalitaire aurait cessé d' y déployer ses ambitions .
Mais cette politique que mène une France redressée aurait tôt fait de s' anéantir si , refaisant de nos pouvoirs les châteaux de cartes qu' ils étaient hier , nous allions à la confusion , et ensuite à la subversion . Alors notre effacement et bientôt notre bouleversement entraîneraient la dislocation de l' Europe occidentale et donneraient le signal au malheur .
Ah ! certes , notre tâche nationale , si elle est pleine d' espérances , comporte aussi beaucoup de soucis . Mais quel jugement devrait -on porter à l' égard des tenants du système d' autrefois , qui exploiteraient les préoccupations publiques pour tenter de ramener la République à certains jeux que l' on sait ! Au nom de quelle force , de quelle vertu , de quelle efficacité , dresseraient -ils leurs prétentions , alors que nul n' ignore au bord de quel gouffre étaient , il y a trois ans , la patrie et la République , alors que personne - y compris eux - mêmes - ne doute que les affaires du siècle sont trop dures pour les combinaisons , alors qu' on peut être convaincu que si , par prodige , ils venaient à rétablir pour un instant leur régime , les activismes extrêmes auraient tôt fait de les submerger et de déchirer la patrie ?
Non ! pour des groupes et des hommes qui ont une valeur et une audience , ce serait une mauvaise action de s' en servir pour une agitation qui nourrirait forcément les chances des fauteurs de troubles . Au contraire , c' est leur devoir de s' employer eux aussi à éclairer le pays au long d' une route difficile , de prendre une part effective à la rénovation en cours , de contribuer à soutenir la foi et l' espérance nationales .
La République poursuit sa route . 80 pour 100 des Français , en toute liberté et en toute connaissance de cause -ce qu' on n' avait jamais vu - ont approuvé nos institutions . Les résultats que celles-ci permettent à la Nation d' atteindre , grâce à la stabilité et à la continuité , sont sans aucun doute évidents . Ainsi que nous l' avons fait hier , nous continuerons de les appliquer demain , dans leur esprit et dans leur lettre .
S' il arrivait que la conjoncture politique vint à mettre en cause le fonctionnement régulier des pouvoirs , gouvernement et Parlement , et par là , en ces temps menaçants , le destin même du pays , le peuple aurait à se faire entendre par les voies qui lui sont ouvertes . Et puis , en cas de péril public , il m' incomberait , comme on le sait , de prendre toutes les mesures commandées par les circonstances . Cette disposition exceptionnelle , qui a efficacement joué lors des événements d' avril , a pu cette fois être maintenue dans un étroit domaine , et , l' alarme paraissant actuellement estompée , j' ai jugé bon d' en cesser hier l' utilisation . Mais elle demeure , dans toute son étendue possible , la garantie suprême de la patrie et de l' Etat .
Pour la France , qui traverse un dur et dangereux passage , le salut et le succès exigent la cohésion nationale .
Vive la République !
Vive la France !