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Qui utilise le plus le mot «connu» ?
Distribution statistique du mot chez l'ensemble des locuteurs du corpus.
Les thèmes autour du mot «connu»
Analyse multi-couches
de la cooccurrence autour du mot choisi dans le discours du qui
F. Mitterrand - 27 septembre 1989
Interview à france culture
Je connaissais déjà Jean Guitton mais d' une façon assez lointaine , assez distanciée . Il avait des amitiés qui étaient les miennes et nous nous croisions . Au cours d' un voyage que je faisais chez des amis dans la Creuse , l' occasion s' est présentée d' aller faire quelques kilomètres pour retrouver Jean Guitton dans sa maison et mes amis avaient coutume de l' y rencontrer . Ils m' y ont donc conduit . Nous nous sommes vus à la fois dans la maison de mes amis et à la fois dans la sienne . J' y suis retourné par la suite en d' autres circonstances et nous avons engage un dialogue dont je me suis vraiment réjoui car c' est un homme bienveillant , ouvert , généreux , frémissant . Tout ce qui touche à la foi , la sienne essentiellement , sa conviction , il veut le faire partager avec le désir de donner à chaque chose et à chaque événement une signification profonde , bref quand on commence une conversation avec lui il y a de quoi s' enrichir et il y a de quoi beaucoup dire et surtout beaucoup entendre . J' ai donc été séduit , attaché à cette personnalité très riche . J' ai visité la chapelle qu' il a édifiée et décorée . J' ai entendu le récit de ses souvenirs d' enfance , de son évolution spirituelle , j' avais déjà lu quelques ouvrages de lui et notamment le portrait de monsieur Pouget , qui est un beau livre . Par la suite , bien entendu , je l' ai suivi de plus près et c' est comme cela que s' est établie entre nous une sorte de relation qui dure et à laquelle j' attache un réel prix .
Je crois que c' est Jean Guitton qui pose le problème en ces termes . On peut peut-être en trouver d' autres . Il n' y a pas simplement à être ceci ou cela , selon la relation qui est faite de notre conversation , mais enfin c' est son interprétation et c' est sa foi et lui il préfère en effet croire , espérer , chercher plus loin plutôt que de s' installer dans la religion de l' absurde qui le répugne , qu' il ne comprend pas , qu' il ne supporte pas .
De ce point de vue , nous n' avions pas de peine à nous entendre . Je pense qu' il est difficile de trouver , il est toujours important de chercher et cette recherche en compagnie de Jean Guitton permet de franchir quelques étapes , ce qui ne veut pas dire que nous partagions la même philosophie .
Il plaide un peu pour son Saint mais c' est par amitié et , je le disais tout à l' heure , par générosité d' esprit . C' est un homme qui voudrait entraîner avec lui sur les chemins qu' il a tracés ou plutôt sur les chemins tracés où il apporte sa conviction , son idéal , il voudrait entraîner tous ceux qu' il aime . J' ai la chance d' être l' un de ceux qui font partie de ce cercle là . Cela ne m' engage pas pour autant , mais c' est vrai que je trouve intérêt à ce type de conversation et surtout à l' ampleur des questions qu' il pose .
Des souvenirs communs , oui , si on veut . Les mêmes lieux , sans doute les mêmes prêtres maristes ou certains d' entre eux . Il est plus âgé que moi , nous n' avons pas connu la même génération d' étudiants mais nous avons vécu dans la même tradition . Il aime beaucoup , comme on disait , le 104 de la rue de Vaugirard . C' est là que vivaient , que logeaient , prenaient pension en somme les étudiants que le hasard de la vie conduisait jusqu' à cette rue de Vaugirard . Moi-même j' y avais été conduit par le fait que le frère de ma mère avait été l' un des premiers étudiants du 104 , presque l' un des fondateurs et un ami très proche du Père Plazenet , très forte personnalité , que j' ai moi-même connu beaucoup plus tard et dont le rayonnement auvergnat allait loin dans nos esprits et dans nos cœurs . Cet oncle est mort à vingt ans . Cette disparition au-delà même de l' attachement familial qui a bercé mon enfance , bien que je ne l' aie jamais connu , a beaucoup frappé mon entourage . Et Jean Guitton lui-même , c' était aussi à cette époque un ami de François MAURIAC a connu cette histoire de famille en même temps que cette famille d' esprit . Mon oncle appartenait au groupe fondateur du sillon de Marc Sangnier . Alors ensuite quand je suis arrivé beaucoup plus tard à Paris en 1934 , je suivais mes études supérieures à la Faculté de Droit , à la Sorbonne et à Sciences Po , je n' ai pas connu Jean Guitton mais il était attaché à cette maison et beaucoup de mes amis le connaissaient . Les prêtres maristes qui encadraient cette maison le connaissaient et l' estimaient . De plus , c' était déjà un intellectuel d' influence et de grande réputation Naturellement , nos anciens avaient tendance a se reporter a cet exemple que l' on nous désignait du doigt pour dire " faites comme lui " .
Quand nous nous sommes vraiment rencontrés , quand nous avons pu parler , on cherche toujours des points de repère , lesquels ? Eh bien justement nous avions eu cette adolescence commune , au même endroit . Nous avions connu les mêmes personnes , on s' attendrit sur son passé et en même temps nous avons un réel attachement pour cette période de ma vie . Aujourd'hui encore , je rencontre , je prends un repas , disons une ou deux fois par trimestre avec une douzaine de camarades de cette époque du 104 de la rue de Vaugirard . C' est dire que ces années là sont toujours des années fortes dans la vie d' un homme . Eh bien , pour Guitton de la génération précédente , c' était la même chose . Alors nous avons franchi la distance et nous avons mêlé nos souvenirs . Comme c' est un esprit aigu , cela donne une force particulière à ce qu' il écrit , je le répète , j' y suis sensible et je suis attaché à ce personnage a propos duquel vous m' avez demandé de m' exprimer .