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Babeuf - 1795 (n°1)
patriotes ! vous êtes un peu découragés , j' ose dire que vous êtes un peu pusillanimes ! vous êtes effrayés de votre petit nombre , et vous craignez l' irréussite . mais vous venez de voir , et tout ce que vous voyez vous dit , qu' il n' y a plus trop à reculer . Vaincre ou mourir ! vous n' avez pas oublié que ce fut notre serment . vos ennemis vous présseront à en venir aux mains : et moi aussi ! en y procédant d' une autre manière qu' ils ne l' entendent , vous employez le dernier moyen de sauver la patrie . je vous ferai donc , malgré vous , êtres braves . je vous forcerai à vous mettre aux prises avec nos communs adversaires ... homme libres ! je ne suis point imprudent ... . je ne suis point prématuré ... vous ne savez pas encore comment et où je veux aller . vous verrez bientôt clair à ma marche ; et , où vous n' êtes point démocrates , ou vous la jugerez bonne et sûre . nous sommes d'abord peu d' ouvriers , il est vrai ; mais nous en aurons bientôt rassemblé ce qu' il faut .
patriotes ! j' ai tout fait pour vous faire reconnaître atteints et convaincus de détester le régime aristocratique sous lequel nous sommes enchaînés , et pour faire voir , d' une manière également manifeste , que vous ne soupirez qu' après le retour de la démocratie , que vous aviez déjà conquise . je l' ai fait , parce que j' ai cru qu' il était temps d' engager le combat entre vous et les perfides ennemis de ce système équitable . il doit maintenant être forcé pour vous , ce combat ! c' est ce que j' ai voulu . il doit être forcé , dis=je , parce que vos ennemis ne peuvent plus méconnaître , et vous=même ne pouvez plus dissimuler , ce que nous voulons . nous n' avons plus d' arrière-pensée . j' ai cru , je crois toujours que si nous laissions échapper ce moment=ci d' en venir aux mains , il ne nous resterait plus longtemps d' espoir de réacquérir cet état de liberté et de bonheur pour lequel nous avons fait tant de sacrifices .
que le gouvernement , tant flatté par les républicains , et que les patriciens avec les royalistes haïssent si cordialement ; que le gouvernement justifie l' espoir des uns , et paie à la haine des autres une rétribution méritée . qu' il aide , au lieu d' entraver , les mouvements nécessaires pour faire rendre au peuple tous ses droits . que les membres du Directoire exécutif aient assez de vertu pour miner leur propre établissement . qu' ils s' éxécutent de bonne grâce , et qu' ils dédaignent , les premiers , tout cet échafaudage d' aristocratie superlative , cette institution gigantesque qui se soutiendrait toujours difficilement , parce qu' elle contraste trop fort avec les principes qui nous ont fait faire la révolution . qu' ils rejettent tout cet attirail , toute cette pompe vénitienne , cette magnificence presque royale , qui scandalisent nos yeux déjà accoutumés à ne plus admirer que ce qui est simple et que ce qui retrace la pure égalité . qu' ils protègent , loin de persécuter encore , les apôtres de la démocratie , et qu' ils en laissent prêcher , en toute liberté , la sainte morale . qu' ils soient aussi grands que le furent Agis et Cléomène , dans des positions assez semblables à la leur .
des institutions doivent assurer le bonheur commun , l' aisance égale de tous les co-associés .
ressouvenons=nous de quelques-uns des principes fondamentaux développés dans notre dernier numéro , sur l' article : de la guerre des riches et des pauvres des répétitions de ce genre n' ennuient point tous ceux qu' elles intéressent .
nous avons posé que l' égalité parfaite est de droit primitif ; que le pacte social , loin de porter atteinte à ce droit naturel , ne doit que donner à chaque individu la garantie que ce droit ne sera jamais violé ; que dès lors , il ne devrait y avoir jamais eu d' institutions qui favorissassent l' inégalité , la cupidité , ; qui permissent que le nécessaire des uns pût être envahi , pour former un superflu aux autres . que cependant , il était arrivé le contraire , que d' absurdes conventions s' étaient introduites dans la société , et avaient protégé l' inégalité , avaient permis le dépouillement du grand nombre par le plus petit ; qu' il était des époques où les derniers résultats de ces meurtrières règles sociales , étaient que l' universalité des richesses de tous se trouvait engloutie dans les mains de quelques-uns ; que la paix , qui est naturelle quand tous sont heureux , devenait nécessairement troublée alors ; que la masse ne pouvant plus exister , trouvant tout hors de sa possession , ne rencontrant que des coeurs impitoyables dans la caste qui a tout accaparé , ces effets déterminaient l' époque de ces grandes révolutions , fixaient ces périodes mémorables , prédites dans le livre des temps et du destin , où un bouleversement général dans le système des propriétés devient inévitable , où la révolte des pauvres contre les riches est d' une nécessité que rien ne peut vaincre .
nous avons démonté que , dès 89 , nous en étions à ce point , et que c' est pour cela qu' a éclaté alors la révolution .
nous avons démontré que , depuis 89 , et singulièrement depuis 94 et 95 , l' agglomération des calamités et de l' oppression publiques avait singulièrement rendu plus urgent l' ébranlement majestueux du peuple contre ses spoliateurs et ses oppresseurs ...
ce n' est pas une égalité mentale qu' il faut à l' homme qui a faim ou a des besoins : il l' avait , cette égalité , dans l' état de nature . je le répète , parce que ce n' est pas là un don de la société ; et parce que pour borner là les droits de l' homme , il valait autant et mieux pour lui , rester dans l' état de nature , cherchant et disputant sa subistance dans les forêts ou sur le bord des mers et des rivières ... la première et la plus dangeureuse des objections , quoique la plus immorale , c' est le prétendu droit de propriété , dans l' acceptation reçue . le droit de propriété ! mais quel est donc ce droit de propriété ? entend=on par là la faculté illimitée d' en disposer à son gré ? si l' on entend ainsi , je le dis hautement , c' est admettre la loi du plus fort . c' est tromper le voeu de l' association ; c' est rappeler les hommes à l' exercice des droits de la nature , et provoquer la dissolution du corps politique . si , au contraire , on ne l' entend pas ainsi , je demande quelle sera donc la mesure et la limite de ce droit ? car enfin , il en faut une . vous ne l' attendez pas , sans doute , de la modération du propriétaire ?
voulez=vous de bonne foi le bonheur du peuple ? voulez=vous le tranquilliser , voulez=vous le lier indissolublement au succès de la révolution et à l' établissement de la république ? voulez=vous faire cesser ses inquiétudes et les agitations intestines , déclarez aujourd`hui que la base de la constitution républicaine des Français sera la limite du droit de propriété .
ce n' est plus dans les esprits qu' il faut faire la révolution ; ce n' est plus là qu' il faut chercher son succès : depuis longtemps qu' elle y est faite et parfaite , toute la France vous l' atteste : mais c' est dans les choses qu' il faut enfin que cette révolution , de laquelle dépend le bonheur du genre humain , se fasse aussi tout entière . eh ! qu' importe au peuple , qu' importe à tous les hommes un changement d' opinion , qui ne leur procurerait qu' un bonheur idéal ? on peut s' extasier sans doute , pour ce changement d' opinion ; mais ces béatitudes spirirtuelles ne conviennent qu' aux beaux esprits et aux hommes qui jouissent de tous les dons de la fortune . il leur est bien facile , à ceux=là , de s' enivrer de la liberté et de l' égalité : le peuple aussi en a bu la première coupe avec délice et transport , il s' en est aussi enivré . mais craignez que cette ivresse ne se passe , et que , revenu plus calme et plus malheureux qu' auparavant , il ne l' attribue à la séduction de quelques factieux , et qu' il ne s' imagine avoir été le jouet des passions ou des systèmes et de l' ambition de quelques individus . la situation morale du peuple n' est aujourd`hui qu' un beau rêve qu' il faut réaliser , et vous ne le pouvez qu' en faisant dans les choses la même révolution que vous avez faite dans les esprits .
est=ce la loi agraire que vous voulez , vont s' écrier mille voix d' honnêtes gens ? non : c' est plus que cela . nous savons quel invincible argument on aurait à nous y opposer . on nous dirait , avec raison , que la loi agraire ne peut durer qu' un jour ; que , dès le lendemain de son établissement , l' inégalité se remontrerait . les tribuns de la France , qui nous ont précédés , ont mieux conçu le vrai système du bonheur social . ils ont senti qu' il ne pouvait résider que dans des institutions capables d' assurer et de maintenir inaltérablement l' égalité de fait .
l' égalité de fait n' est pas une chimère . l' essai pratique en fut heureusement entrepris par le grand tribun Lycurgue . on sait comment il était parvenu à instituer ce système admirable , où les charges et les avantages de la société étaient également répartis , où la suffisance était le partage imperdable de tous , et où personne ne pouvait atteindre le superflu .
tous les moralistes de bonne foi reconnurent ce grand principe et cherchèrent à le consacrer . ceux qui l' énoncèrent plus clairement furent , à mon avis , les hommes les plus estimables et les plus distingués tribuns . le juif Jésus-Christ ne mérite que médiocrement ce titre , pour avoir trop obscurément exprimé la maxime : aime ton frère comme toi=même , a=til dit . cela insinue bien , mais cela ne dit pas assez explicitement , que la première de toutes les lois est qu' aucun homme ne peut légitimement prétendre que nul de ses semblables soit moins heureux que lui .
J-Jacquyes a mieux précisé ce même principe , quand il a écrit : pour que l' état social soit perfectionné , il faut que chacun ait assez , et qu' aucun n' ait trop . ce court passage , est , à mon sens , l' élixir du contrat social . son auteur l' a rendu aussi intelligible qu' il le pouvait faire au temps où il écrivait , et peu de mots suffit à qui sait entendre .
écoutez Diderot , il ne vous laissera pas plus d' équivoque sur le secret du véritable et seul système de sociabilité conforme à la justice : discourez tant qu' il vous plaira , dit=il , sir la meilleure forme de gouvernement , vous n' aurez rien fait tant que vous n' aurez point détruit les germes de la cupidité et de l' ambition . il ne faut point de commentaire pour expliquer que , dans la meilleure forme de gouvernement , il faut qu' il y ait impossibilité à tous les gouvernés de devenir , ou plus riches , ou plus puissants en autorité , que chacun de leurs frères ; afin qu' au terme d' une juste , égale et suffisante portion d' avantage pour chaque individu , là , la cupidité s' arrête et l' ambition rencontre des bornes judicieuses .
Robespierre va aussi vous dire , que telles sont les bases de tout pacte fondé sur l' équité , sur les droits primitifs ou de la nature . le but de la société , , dit=il dans sa déclaration des droits , est le bonheur commun , c`est-à-dire , évidemment , le bonheur égal de tous les individus , qui naissent égaux en droits et en besoins . et plus loin cette autre maxime de morale éternelle : ne fais point à autrui ce que tu ne voudrais point qu' on te fît à toi . c`est-à-dire : fais aux autres tout ce que tu voudrais qu' on te fît à toi .
et n' était=ce pas , armé de la plus souveraine raison , que Saint-Just , lorsqu' on paraissait vouloir contester ces vérités incontestables , venait leur donner une double égide , en vous adressant ces paroles remarquables , à vous , sans-culottes toujours opprimés : " ; les malheureux sont les puissances de la terre , ils ont le droit de parler en maîtres aux gouvernements qui les négligent . " ;
la religion de la pure égalité , que nous osons prêcher à tous nos frères dépouillés et affamés , leur paraîtra peut-être encore neuve à eux=mêmes , quelque naturelle qu' elle soit ; elle leur paraîtra , dis=je , peut-être encore neuve , par la raison que nous sommes tellement vieillis dans nos barbares et nombreuses institutions , que nous avons peine à en concevoir de plus justes et de plus simples .
faut=il , pour rétablir les droits du genre humain et faire cesser tous nos maux , faut=il une retraite au Mont sacré , ou une Vendée Plébéienne ? que tous les amis de l' égalité s' apprêtent et se tiennent déjà pour avertis ! que chacun se pénètre de l' incomparable beauté de cette entreprise . les Israléites à délivrer de la servitude égyptienne ! à conduire à la possession des terres de Chanaan ! quelle expédition fut jamais plus digne d' enflammer de grands courages ? le dieu de la liberté , soyons=en sûrs , protégera les Moyse qui voudront la diriger . il nous l' a promis , sans l' interméidaire d' Aaron , dont nous n' avons que faire , non plus que de son collège vicarial . il nous l' a promis , sans apparition miraculeuse dans le buisson ardent . laissons là tous ces prodiges , toutes ces sottises . les inspirations des divinités républicaines se manifestent tout simplement , sous les auspices de la nature ( dieu suprême ) par la voix du coeur des républicains . il nous est donc révélé que , tandis que de nouveaux Josué combattront un beau jour dans la plaine sans avoir besoin de faire arrêter le soleil , plusieurs , en place d' un législateur des Hébreux , seront sur la véritable montagne Plébéienne . ilsy traceront , sous la dictée de l' éternelle justice , le décalogue de la sainte humanité , du sans-culottisme , de l' imprescriptible équité . nous proclamerons , sous la protection de nos cent mille lances et de nos bouches à feu , le véritable premier code de la nature , qui n' aurait jamais dû être enfreint .
nous expliquerons clairement ce que c' est que le bonheur commun , but de la société .
nous demontrerons que le sort de tout homme n' a pas dû empirer au passage de l' état naturel à l' état eocial .
nous définirons la propriété .
nous prouverons que le terroir n' est à personne , mais qu' il est à tous .
nous prouverons que tout ce qu' un individu en accapare au delà de ce qui peut le nourrir , est un vol social .
nous prouverons que le prétendu droit d' aliénabilité est un infâme attentat populicide .
nous prouverons que l' hérédité par famille est une non moins grande horreur ; qu' elle isole tous les membres de l' association , et fait de chaque ménage une petite république , qui ne peut que conspirer contre la grande , et consacrer l' inégalité .
nous prouverons que tout ce qu' un membre du corps social a au-dessous de la suffisance des besoins de toute espèce et de tous les jours , est le résultat d' une spoliation de sa propriété naturelle individuelle , faite par les accapareurs des biens communs .
que , par la même conséquence , tout ce qu' un membre du corps social a au-dessus de la suffisance de ses besoins de toute espèce et de tous les jours , est le résultat d' un vol fait aux autres coassociés , qui en privé nécessairement un nombre plus ou moins grand , de sa cote-part dans les biens communs .
que tous les raisonnements les plus subtils ne peuvent prévaloir contre ces inaltérables vérités .
que la supériorité de talents et d' industrie n' est qu' une chimère et un leurre spécieux , qui a toujours indûment servi aux complots des conspirateurs contre l' égalité .
que la différence de valeur et de mérite dans le produit du travail des hommes , ne repose que sur l' opinion que certains d' entre eux y ont attachée , et qu' ils ont su faire prévaloir .
que c' est sans doute à tort que cette opinion a apprécié la journée de celui qui fait une montre , vingt fois plus que la journée de celui qui trace des sillons .
que c' est cependant à l' aide de cette fausse estimation , que le gain de l' ouvrier horloger l' a mis à portée d' acquérir le patrimoine de vingt ouvriers de charrue , qu' il a , par ce moyen , expropriés .
que tous les prolétaires ne le sont devenus que par le résultat de la même combinaison dans tous les autres rapports de proportion , mais partant tous de l' unique base de la différence de valeur établie entre les choses par la seule autorité de l' opinion .
qu' il y a absurdité et injustice dans la prétention d' une plus grande récompense pour celui dont la tâche exige un plus haut degré d' intelligence , et plus d' application et de tension d' esprit ; que cela n' étend nullement la capacité de son estomac .
qu' aucune raison ne peut faire prétendre une récompense excédant la suffisance des besoins individuels .
que ce n' est non plus qu' une chose d' opinion que la valeur de l' intelligence , et qu' il est peut-être encore à examiner si la valeur de la force toute naturelle et physique , ne la vaut point .
que ce sont les intelligents qui ont donné un si haut prix aux conceptions de leurs cerveaux , et que , si c' eût été les forts qui eussent concurremment réglé les choses , ils auraient sans doute établi que le mérite des bras valait celui de la tête , et que la fatigue de tout le corps pouvait être mise en compensation avec celle de la seule partie ruminante .
que sans cette égalisation posée , on donne aux plus intelligents , aux plus industrieux , un brevet d' accaparement , un titre pour dépouiller impunément ceux qui le sont moins .
que c' est ainsi que s' est détruit , renversé dans l' état social , l' équilibre de l' aisance , puisque rien n' est mieux prouvé que notre grande maxime : qu' on ne parvient à avoir trop qu' en faisant que d' autres n' aient point assez .
que toutes nos institutions civiles , nos transactions réciproques ne sont que les actes d' un perpétuel brigandage , autorisé par d' absurdes et de barbares lois , à l' ombre desquelles nous ne sommes occupés qu' à nous entre-dépouiller .
que notre société de fripons entraîne , à la suite de ses atroces conventions primordiales , toutes les espèces de vices , de crimes et de malheurs contre lesquels quelques hommes de bien se liguent en vain pour leur faire la guerre , qu' ils ne peuvent rendre triomphante parce qu' ils n' attaquent point le mal dans sa racine , et qu' ils n' appliquent que des palliatifs puisés dans le réservoir des idées fausses de notre dépravation organique .
qu' il est clair , par tout ce qui précède , que tout ce que possèdent ceux qui ont au delà de leur cote-part individuelle dans les biens de la société , est vol et usurpation .
qu' il est donc juste de le leur reprendre .
que celui=même qui prouverait que , par l' effet de ses seules forces naturelles , il est capable de faire autant que quatre et qui , en conséquence , exigerait la rétribution de quatre , n' en serait pas moins un conspirateur contre la société , parce qu' il en ébranlerait l' équilibre par ce seule moyen , et détruirait la précieuse égalité .
que la sagesse ordonne impérieusement à tous les co-associés de réprimer un tel homme , de le poursuivre comme un fléau social , de le réduire au moins à ne pouvoir faire que la tâche d' un seul , pour ne pouvoir exiger que la récompense d' un seul .
que ce n' est que notre seule espèce qui a introduit cette folie meurtrière de distinction de mérite et de valeur , et qu' aussi ce n' est qu' elle qui connaît le malheur et les privations .
qu' il ne doit point exister de privation des choses que la nature donne à tous , produit pour tous , si ce n' est celles qui sont la suite des accidents inévitables de la nature , et que dans ce cas , ces privations doivent être supportées et partagées également par tous .
que les productions de l' industrie et du génie deviennent aussi la propriété de tous , le domaine de l' association entière , du moment même que les inventeurs et les travailleurs les ont fait éclore ; parce qu' elles ne sont qu' une compensation des précédentes inventions du génie et de l' industrie , dont ces inventeurs et ces travailleurs nouveaux ont profité dans la vie sociale , et qui les ont aidés dans leurs découvertes .
que , puisque les connaissances acquises sont le domaine de tous , elles doivent donc être également réparties entre tous .
qu' une vérité contestée mal à propos par la mauvaise foi , le préjugé ou l' irréflexion , c' est que cette répartition égale rendrait tous les hommes à peu près égaux en capacité et même en talent .
que l' éducation est une monstruosité , lorsqu' elle est inégale lorsqu' elle est le patrimoine exclusif d' une portion de l' association ; puisqu'alors elle devient , dans les mains de cette portion , un amas de machines , une provisions d' armes de toutes sortes , à l' aide desquelles cette première portion combat l' autre qui est désarmée , parvient facilement , en conséquence , à la juguler , à la tromper , à la dépouiller , à l' asservir sous les plus honteuses chaînes .
qu' il n' est pas de vérité plus importante que celle que nous avons citée , et qu' un philosophe a proclamée en ces termes : discourez tant qu' il vous plaira sur la meilleure forme du gouvernement , vous n' aurez rien fait , tant que vous n' aurez point détruit les germes de la cupidité et de l' ambition .
qu' il faut donc que les institutions sociales mènent à ce point , qu' elles ôtent à tout individu l' espoir de devenir jamais ni plus riche , ni plus puissant , ni plus distingué par ses lumières , qu' aucun de ses égaux .
qu' il faut , pour préciser davantage ceci , parvenir à enchaîner le sort ; à rendre celui de chaque co-associé indépendant des chances et des circonstances heureuses et malheureuses ; à assurer à chacun et à sa postérité , telle nombreuse qu' elle soit , la suffisance , mais rien que la suffisance ; et à fermer , à tous , toutes les voies possibles , pour obtenir jamais au delà de la cote-part individuelle dans les produits de la nature et du travail .
que le seul moyen d' arriver là , est d' établir l' administration commune ; de supprimer la propriété particulière ; d' attacher chaque homme au talent , à l' industrie qu' il connaît ; de l' obliger à en déposer le fruit en nature au magasin commun ; et d' établir une simple administration de distribution , une administration des subsistances , qui , tenant registre de tous les individus et de toutes les choses , fera répartir ces dernières dans la plus scrupuleuse égalité et les fera déposer dans le domicile de chaque citoyen .
que ce gouvernement , démontré praticable par l' expérience , puisqu'il est celui appliqué aux douze cent mille hommes de nos douze armées , ( ce qui est possible en petit l' est en grand ) ; que ce gouvernement est le seul dont il peut résulter un bonheur universel , inaltérable , sans mélange ; le bonheur commun , but de la société .
que ce gouvernement fera disparaître les bornes , les haies , les murs , les serrures aux portes , les disputes , les procès , les vols , les assassinats , tous les crimes ; les tribunaux , les prisons , les gibets , les peines , le désespoir que causent toutes ces calamités ; l' envie , la jalousie , l' insatiabilité , l' orgueil , la tromperie , la duplicité , enfin tous les vices ; plus ( et ce point est sans doute l' essentiel ) , le ver rongeur de l' inquiétude générale , particulière , perpétuelle de chacun de nous , sur notre sort du lendemain , du mois , de l' année suivante , de notre vieillesse , de nos enfants et de leurs enfants .
tel est le précis sommaire de ce terrible Manifeste que nous offrirons à la masse opprimée du peuple français , et dont nous lui donnons la première esquisse pour lui en faire saisir l' avant-goût .
peuple ! réveille=toi à l' espérance , cesse de rester engourdi et plongé dans le découragement .
épanouis=toi à la vue d' un futur avenir heureux . amis des rois ! perdez toute idée que les maux dont vous avez accablé ce peuple , le soumettront définitivement au joug d' un seul . et vous , patriciens ! riches ! tyrans républicains ! renoncez également et tous en même temps à vos spéculations oppressives , sur cette nation qui n' a pas entièrement oublié ses serments à la liberté . une perspective plus riante que tout ce dont vous la leurrez , s' offre à ses regards . dominateurs coupables ! au moment où vous croyez pouvoir , sans péril , appesantir vos bras de fer sur ce peuple vertueux , il vous fera sentir sa supériorité , il s' affranchira de toutes vos usurpations et de vos chaînes , il recouvrera ses droits primitifs et sacrés . depuis trop longtmps , vous vous jouez de sa magnanimité ; depuis trop longtemps vous insultez à son agonie ...
" ; le peuple , dites=vous , est sans vigueur ; il souffre et il meurt sans oser se plaindre . " ; les fastes de la république ne seront point souillés d' une telle humiliation ! le nom français n' ira point à la postérité accompagné d' un tel avilissement . que cet écrit soit le signal , soit l' éclair qui ranime et revivifie tout ce qui eut autrefois de la chaleur et du courage ! tout ce qui brûla d' une flamme ardente pour le bonheur public et la parfaite indépendance . que le peuple y prenne la véritable première idée de l' égalité ! que ces mots : égalité , égaux , plébéianisme , soient les mots de ralliement de tous les amis du peuple . que le peuple remette à la discussion tous les grands principes ; que le combat s' engage sur le fameux chapitre de cette égalité proprement dite , et sur celui de la propriété ! qu' il en goûte cette fois , précisément la morale , et qu' elle l' embrase d' un feu soutenu jusqu' à l' entière consommation de son oeuvre ! qu' il renverse toutes ces anciennes institutions barbares , et qu' il y substitue celles dictées par la nature et l' éternelle justice . et oui , tous les maux du peuple sont à leur comble ; ils ne peuvent plus empirer ! ils ne peuvent se réparer que par un entier bouleversement ? que cette guerre atroce du riche contre le pauvre prenne enfin une couleur moins ignoble ? qu' elle cesse d' avoir ce caractère de toute audace d' un côté , et de toute lâcheté de l' autre ! que ces malheureux répondent enfin à leurs agresseurs ! ... profitons de ce qu' ils nous ont poussés à bout . avançons sans détours , comme des hommes qui ont le sentiment de leurs forces : marchons franchement à l' égalité . voyons le but de la société ; voyons le bonheur commun !
perfides ou ignorants ! vous criez qu' il faut éviter la guerre civile ? qu' il ne faut point jeter parmi le peuple de brandon de discorde ? et quelle guerre civile plus révoltante que celle qui fait voir tous les assassins d' une part , et toutes les victimes sans défense de l' autre ? pouvez=vous faire un crime à celui qui veut armer les victimes contre les assassins ? ne vaut=il pas mieux la guerre civile où les deux partis peuvent se défendre réciproquement ? qu' on accuse donc , si l' on veut , notre journal d' être un tison de discorde . tant mieux : la discorde vaut mieux qu' une horrible concorde où l' on étrangle la faim . que les partis en viennent aux prises ; que la rébellion partielle , générale , instante , reculée , se détermine ; nous sommes toujours satisfaits ! que le Mont Sacré ou la Vendée plébéienne se forme sur un seul point ou dans chacun des 86 départements ! que l' on conspire contre l' oppression , soit en grand , soit en petit , secrètement ou à découvert , dans cent mille conciliabules ou dans un seul , peu nous importe , pourvu que l' on conspire , et que désormais les remords et les transes accompagnent tous les moments des oppresseurs . nous avons donné tout haut le signal , afin que beaucoup l' aperçoivent ; afin d' appeler beaucoup de complices ; nous leur avons donné les motifs bien justifiés et quelques idées du mode , nous sommes à peu près sûrs que l' on conspirera . que la tyrannie essaie si elle peut se mettre en mesure de nous entraver . . le peuple , dit=on n' a point de guides . qu' il en apparaisse , et le peuple , dès l' instant , brise ses chaînes , et conquiert du pain pour lui et pour toutes ses générations . répétons=le encore : tous les maux sont à leur comble ; ils ne peuvent plus empirer ; ils ne peuvent se réparer que par un bouleversement total ! ... que tout se confonde donc ! ... , que tous les éléments se brouillent , se mêlent et s' entrechoquent ! ... que tout rentre dans le chaos , et que du chaos sorte un monde nouveau et régénéré !
" ; venons , après mille ans , changer ces lois grossières . " ; '